De ce voyage en train,
il ne me reste rien
Pas même le ciel bleu d'un hiver courageux
Du plan irréductible tout au long du chemin
Sur les branches des sapins,
je n'm'en souviendrai pas
Du givre acrobate qui s'agrippe à chaque branche
De cette prairie laineuse où l'on voudrait
rouler
De ce voyage en train,
il ne me reste rien De ce rayon soudain,
coup d'épée aveuglant
Ni du verre translucide,
de l'eau vive en dessous Ni des cailloux au fond,
je n'm'en
souviendrai pas
Du reflet confondant qu'une poule d'eau dérisoire
S'amuse à fendre en deux,
et puis une autre encore
De ce train,
ce voyage,
il ne restera rien Ni la voix du monsieur au fond du haut-parleur
Son accent, sa voyage, se retard estimé
À dix minutes au moins,
je n'm'en souviendrai
pas
Du moelleux des fauteuils,
de ces wagons d'avant Des coussins fatigués,
sales,
mais réconfortants
Et du creux dans mon ventre
Il ne restera pas la fumée de l'usine
Que l'on a rattrapée juste avant la forêt
La centrale électrique et cette route nationale
Que nous frôlâmes longtemps sans néanmoins
La fendre de cette autre rivière Ou peut-être la même
de ce pont suspendu
De cet homme à vélo, passage à niveau
Je n'm'en souviendrai pas
Car je suis occupé à penser à ce jour,
à son étrangeté,
à cette locomotive,
à ma mère
qui n'est plus désormais
sur la terre