J'avance les yeux fermés,
guidés par les cigales,
les chemins escarpés,
le jeu des diagonales,
au détour d'un sentier,
le lac en contrebas,
les garçons enlacés,
l'animal immédiat.
Réinventer l'amour
près du lac inconnu,
tout reprendre à rebours,
inviter l'imprévu.
Plonger dans les eaux noires,
immobiles et glacées,
monter au promontoire,
observer le balai.
Je m'abîme tout entier dans la contemplation des garçons de l'année
en mal de sensation.
Quelques jeunes crevettes
font leur apprentissage,
bronzent sur les serviettes en tenue camouflage.
Il y a les baigneurs,
le danger excitant,
et quelques vieux branleurs,
le soleil écrasant.
Quelques habitués ont fait tomber le jean.
Tout cela fait monter
le taux d'adrénaline.
Inconnu de ce lac où tout le monde se connaît,
recoin paradisiaque,
épuisant de beauté.
Au milieu des feuillages,
je domine ma peur,
la polon du rivage,
à des mains d'étrangleurs.
Des mains d'étrangleurs.
Sous un ciel sans nuages,
près du premier venu,
à deux pas de la plage,
les secrets
sont à vue.
Réinventer l'amour.
Puis je pique une tête dans le miroir du lac.
Certains comptent fleurettes,
en canoës, kayak.
J'ai nagé plus d'une heure,
et puis je m'éternise.
Le temps s'épiphanise dans un calme trompeur.
Et ces pierres et le loup dans la nuit oppressante.
Et ces pierres et le loup.
J'ai très mal au plexus,
mais je craignais bien plus la vie insuffisante.
La nuit vient de tomber,
mon cœur bat à tout rompre,
car je sais que tu n'es pas
ma meilleure rencontre.
Je garderai secret jusqu'à mon dernier jour,
que je t'ai vu noyer, mon rival en amour.