Au premier contrefort,
ils se sont arrêtés,
exténués à garde et faits.
Là-haut grondait l'orage,
là-haut se rassemblaient d'insondables nuages.
C'était trop difficile,
et la nuit qui tombait
a eu raison de leur courage.
Sans rien dire, ils ont fait demi-tour,
frileux amateurs, piteux arpenteurs effrayés,
sur les chemins des herbes.
Et voyant les lumières de la ville grandir,
l'un d'eux s'est lancé,
dans un dernier discours.
Il nous faudrait souffler,
c'est l'heure,
c'est l'heure de décamper.
On connaît l'aventure,
passez jeunesse,
finis les indulgences,
finis les envolées.
Il nous faut l'accepter,
ainsi parlaient nos pères,
et leurs pères,
et leurs pères,
et leurs pères.
Ne *** plus rien,
mal visage,
devant les révolutions avortées,
devant les nombreuses défaites.
Reste un pas vide sous la tempête,
nos amis,
un par un,
rejoignent le vaste monde.
À notre tour, mes frères,
rentrons dans la ronde, entrons dans la ronde.
Mais une pluie torrentielle se mit à tomber,
et notre beau parleur en fut presque noyé.
Trois naufragés rentraient dans leur pénate,
en frissonnaient encore,
et leur vision des
choses en était renversée.
Ainsi,
il faut chercher l'abri pour l'hiver qui commence,
ainsi,
il faut remiser au grogner
nos vieilles équipées.
Toutes les petites danses,
toutes les insolences,
c'était cron,
la mer à boire,
la muse
à détrousser, tant de gens à saigner le soir,
le soir après dîner.
Dessons les années sans granger,
on les retrouve enfin dégrisés,
nos seigneurs,
croulant
sous les honneurs.
Ils ont eu chaud,
parlé trop fort,
pété trop haut,
mais il est
*** que les meilleurs de nos candides,
les vrais faux enfants terribles,
retombent toujours
sur leurs pieds,
à la fin.
Voici nos amis,
un bourgeoisé,
dans leur vaste chaumière,
usinant pour l'amour de la terre entière.
Tandis que leurs enfants s'amusent à faire la guerre,
et déjà s'imaginent ardents révolutionnaires.
Amis des hommes en général,
ces adolescents boudeurs,
sous le regard à tendri des parents qui comprennent,
pardonnent par avance,
ah la jeune exubérance,
va encore faire des siennes.
Les petites danses,
les insolences,
la mer à boire,
la muse à détrousser,
tant de
gens à saigner le soir,
le soir après dîner.
On connaît la suite ?
Un beau jour, plus
un amphitryon pour leur donner la collade,
gentiment les héberger,
désamorcer leurs
pièges, oublier leurs excès.
Il est temps de rentrer,
et sans rien perdre de leur élégance,
les petits princes iront de succès,
en succès,
avec une belle inconséquence.
Quant au vilain
petit canard, nous n'en parlerons pas,
c'est la vie, c'est comme ça,
etc.